L’histoire du paravent

L’origine du paravent nous conduit en Chine à la fin de la dynastie Chou, entre le IVe et le IIIe siècle avant Jésus-Christ. C’est ici que l’on trouve la première référence écrite d’un paravent. Les Chinois considéraient les paravents comme des objets de contemplation et une source d’inspiration spirituelle et créative.

Les Japonais adoptèrent de nombreux aspects de la culture chinoise, ce qui conduisit à l’introduction du paravent qui acquit rapidement une grande popularité. Au Japon de nouvelles formes et fonction se développèrent pour les paravents. Le paravent japonais, à la différence du chinois – qui se caractérisait par une certaine monumentalité et lourdeur – était délicat et léger, et trouvait différents usages dans la vie quotidienne. Dans les maisons japonaises, on trouvait notamment différents styles de paravents avec des fonctions bien spécifiques. Par exemple placé à l’entrée, le paravent servait à se prémunir contre les mauvais esprits. On peut également citer le fusuma, un paravent coulissant, et enfin le byobu, littéralement « protection contre le vent », un paravent pliant composé de plusieurs panneaux.

Le paravent s’est développé indépendamment en Europe. Au Moyen Âge, le paravent, comme son nom l’indique servait à se prémunir des courants d’air indésirables. Quand on se rappelle les proportions des salles et des pièces médiévales, on comprend pourquoi les gens de l’époque cherchaient à la fois à se protéger du froid et à créer plus d’intimité dans leurs espaces de vie.

La rencontre de l’occident et de l’orient au XVIe siècle, avec l’ouverture de routes maritimes vers l’Asie va donner une nouvelle impulsion au développement du paravent.

Dès la fin du XVIIe siècle, on trouve en Europe des imitations des célèbres paravents de coromandel chinois, qui étaient faits de cuir gaufré. Au fil du temps, le paravent a subi l’influence de différents styles ce qui lui a permis de s’harmoniser avec toutes sortes de décors.

Il convient de mentionner l’importance fonctionnelle du paravent dans le cadre de la digue baroque, comme le montrent des opéras tels que Le Mariage de Figaro et Der Rosenkavalier. Le paravent a longtemps été le support indispensable des comédies romantiques au théâtre comme au cinéma.

Jusqu’au alentours de 1880, les paravents intérieurs étaient, à quelques exceptions près, produits par des artisans et des artistes anonymes et étaient considérés comme un simple meuble. Au fil du temps, le paravent est devenu un objet décoratif et a commencé à attirer l’attention de nombreux artistes de renom. Paul Cézanne, par exemple, a créé un paravent peint à six panneaux. Le paravent a également été un vecteur d’expression artistique pour Paul Klee et Marc Chagall, qui ont créé un dessin produit à des centaines d’exemplaires par lithographie.

Un des moteurs de l’évolution du paravent a été le concept architectural du Gesamtkunstwerk, qui a émergé dans les premières décennies du XXe siècle, ainsi qu’une nouvelle tendance dans le design et la décoration intérieure qui s’est concentrée en France. L’expression et l’apogée de cette tendance est l’Exposition Internationale des Arts Décoratifs et Industriels Modernes qui se tient à Paris en 1925. C’est la première foire internationale consacrée aux arts appliqués.L’un des protagonistes de cette tendance était Eileen Gray (1879-1976), qui a commencé son impressionnante carrière de designer et d’architecte en concevant des paravents. Ses œuvres les plus connues sont ses paravents laqués.Nouvelle et fructueuse fut l’étroite relation de travail qui s’établit entre architectes, designers, artisans et artistes. Parmi les membres de cette génération, citons par exemple Jean-Michel Frank (1895-1941), le décorateur parisien surdoué des années 20 et 30, qui est encore aujourd’hui une référence pour les amateurs d’art déco. Il existe un certain nombre de paravents connus pour avoir été créés par Frank, dont certains sont le résultat de sa coopération avec des artistes tels que Diego Giacometti et Salvador Dalí.Aujourd’hui, les paravents continuent d’être produits par des designers contemporains, et il y a eu un regain d’intérêt à l’échelle internationale.Outre la rencontre de différentes cultures, un facteur psychologique explique une grande partie de l’attrait du paravent : la dissimulation de certaines perspectives au spectateur. Ce qui est caché et qui ne se discerne que par ses contours, exerce invariablement une fascination irrésistible.